Benjamin OLLOMO et la découverte d’un nouvel agent de transmission du paludisme

 

Comme toute maladie dont les chercheurs n’arrivent pas à trouver une solution ou une réponse définitive, le paludisme (malaria) reste un sujet de recherche incontournable pour les chercheurs africains. Et cela pour une raison essentielle : il tue en Afrique, selon l’OMS, plus d’un million de personnes par an. C’est la première cause de mortalité en Afrique.
Des centres de recherche travaillent en Afrique sur cette maladie.

 

 

Il y en a deux plus particulièrement et qui sont appuyés par l’AUF : le MRTC à Bamako au Mali (qui est un pôle d’excellence et qui est dirigé par le professeur Doumbo Ogobara, éminent membre du Conseil scientifique de l’AUF) et le CIRMF au Gabon. Doumbo Ogobara travaille plus particulièrement sur le vaccin alors que le CIRMF a entrepris des études génétiques.
Benjamin Ollomo, chercheur gabonais dans cette structure internationale, a récemment découvert un nouveau plasmodium, c’est-à-dire un nouvel agent de transmission du paludisme et qui a été baptisé Plasmodium gaboni qu’il a trouvé, notamment sur les chimpanzés animaux de compagnie des forestiers du Gabon.
Pourquoi cette découverte est-elle considérée aujourd’hui comme majeure ?
Pour deux raisons essentiellement. D’abord parce qu’elle révolutionne tout ce que l’on savait sur le mode de transmission du paludisme. On savait en effet que le paludisme est transmis par le moustique femelle qui pique la nuit un paludéen. Elle absorbe ainsi des plasmodium qui, après avoir accompli un cycle complexe, vont se loger dans les glandes salivaires de l’anophèle et inoculer à un homme sain lors de la piqûre suivante. Il s’agit donc d’une transmission de l’homme à l’homme via le moustique. Or, pour le docteur Benjamin Ollomo, ce qui est nouveau, c’est désormais le lien entre le Plasmodium porté par un grand singe et celui porté par les hommes (le Plasmodium falciparum). Benjamin Ollomo précise : « Partant de l’idée que, dans cette zone (Afrique centrale), le paludisme règne de façon endémique et que les habitants ont des contacts répétés avec les singes à la fois pour la chasse et en tant qu’animaux de compagnie, je voulais voir si ces derniers étaient eux aussi infectés par des Plasmodium ».
De là découle la seconde raison. Pour lui, compte tenu de la proximité zoologique entre le chimpanzé et l’homme et de l’expansion de ce dernier, les parasites hébergés par l’un passeront plus facilement chez l’autre. Il y a donc un risque potentiel que l’homme récupère un nouvel agent pathogène. D’où le conseil qu’il donne aux forestiers et aux pouvoirs publics, à savoir : éviter de ramener des grands singes dans les villes et villages.
Une découverte très difficile
On l’imagine, cette découverte n’a pas été facile. D’abord, il n’est pas facile de prélever des échantillons sanguins sur des chimpanzés. Il a donc d’abord travailler sur des petits singes, les cercopithèques. Et là, il met à jour des parasites inconnus. Il y a 5 ans, il a découvert un chimpanzé infecté par un Plasmodium connu chez les primates africains (Plasmodium reichenowi) et par un autre Plasmodium inconnu mais difficile à isoler du fait de la double infection et des limites de l’équipement technologique sur place. Devant cette difficulté, il ne baisse pas les bras. Grâce au soutien du docteur Eric Leroy (IRD) et de François Renaud (Laboratoire Génétique et évolution des maladies infectieuses (GEMI), qui est doté de l’infrastructure nécessaire, il va réaliser des opérations de prélèvement de sang sur dix espèces de grands singes dans l’ensemble du Gabon. Et c’est à la suite de cela qu’il a réussi à isoler le Plasmodium gaboni.
 
Le premier Plasmodium découvert chez les grands singes est le Plasmodium reichenowi. Ce dernier est très proche du Plasmodium falciparum inféodé à l’espèce humaine alors que Plasmodium gaboni s’en révèle plus éloignée et se serait donc séparée des deux autres à une date plus lointaine. Benjamin Ollomo travaille actuellement à l’étude comparative des génomes des trois Plasmodium présents chez les primates pour comprendre comment ces pathogènes s’adaptent à leurs hôtes et par là trouver des clés pour développer de nouveaux moyens de lutte contre cette pathologie.
Benjamin Ollomo a fait ses études d’abord au Gabon à l’USTM et ensuite à Paris au Museum d’histoire naturelle où il a soutenu sa thèse de biologie en 1998. L’article qui traite de sa découverte a été publié dans la revue américaine PLOS PATHOGENS et a été primé en 2009 par le CENAREST par un prix de 750.000 FCFA dans la catégorie « Publication ». Il a publié d’autres travaux dans d’autres revues scientifiques au niveau mondial. Ollomo travaille dans l’équipe de parasitologie du CRMF sur la paludologie, la science qui étudie les paludismes, notamment sur les modèles expérimentaux et l’entomologie.

Le CIRMF est un des plus grands centres de recherche en Afrique subsaharienne. Il a été créé en 1979 à travers un partenariat original entre l’Etat gabonais et la société Total. Il est établissement membre de l’AUF et son directeur, Jean-Paul Gonzalez a été élu lors de l’Assemblée générale de l’AUF en mai dernier à Bordeaux comme membre du Conseil d’ad

 

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